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La production du maïs dans les organisations paysannes de la zone forestière du Cameroun un exemple de chantier-école

Albert AKOA
Service d'appui aux initiatives locales de développement, Yaoundé, Cameroun

Si le mouvement paysan au Cameroun est aujourd'hui en pleine croissance institutionnelle et organisationnelle, il doit cependant faire face à un problème sérieux: celui de son décollage économique à partir de sa production,

En effet, la plupart des fédérations de groupements paysans, avec l'appui du Service d'appui aux initiatives locales de développement 1 (SAILD), ont connu dès leur naissance une phase de structuration et de mobilisation, afin de savoir quel modèle d'organisation pouvait résoudre quels types de problèmes, faisant ainsi de la formation leur cheval de bataille et leur activité phare. Ne pouvant en rester là, de peur de s'enliser dans le «mal institutionnel», la réflexion s'est développée autour du thème «comment donner une vie économique aux organisations paysannes».

Le constat

Il s'est dégagé de cette réflexion, menée au sein des fédérations lors d'ateliers, que les organisations paysannes au Cameroun sont de véritables forces de production dans les domaines tels que les cultures vivrières et maraîchères, l'élevage et le domaine culturel. Mais les paysans ne savent pas comment vendre ou écouler leurs produits. C'est un problème sérieux.

De nombreuses difficultés sont liées à ce problème d'écoulement des produits:

Tous ces constats ont permis de déboucher sur la recherche d'un axe d'action commun: cultiver des produits à bonne rentabilité économique et à cycle court et qui se vendent beaucoup.

Sous un tout autre angle, la montée de l'élevage de poulets et de porcs, avec des unités de production de provende intégrées, s'est avérée être une opportunité pour les organisations paysannes.

La culture du maïs dans les organisations paysannes

Conscients des problèmes évoqués ci-dessus, les paysans, devant l'arrivée d'une société de commercialisation de semences de maïs sélectionné (Pioneer Agro-genetic) et bien qu'ils soient en zone de forêt, ont entrepris sans consulter de structures d'appui de défricher des centaines d'hectares de forêt. Ce n'est qu'en cours de processus que nous avons pu aider les intéressés.

Plusieurs fédérations, à l'exemple de l'UGAPLY (Union des groupements et associations paysannes de Lembe Yezoum), ont produit en 1991-1992 environ 75 à 120 tonnes de maïs.

Les problèmes rencontrés

Plusieurs problèmes ont limité dans la plupart des fédérations la production en grande quantité du maïs:

Quelques essais de solutions

Au sein de l'UGAPLY par exemple, les paysans, pour résoudre le problème de stockage, ont fait appel à leurs confrères de l'UGAPAB (Union des groupements et associations pour l'autopromotion des Bamboutous à l'ouest) plus spécialisés dans la culture du maïs et dans la construction des cribs, sortes de magasins en bambous sur pilotis faits avec du matériel local.

Vu les problèmes techniques, une formation plus spécifique aux techniques de stockage et à la production s'est poursuivie, A ce jour, plus de quinze organisations paysannes telles l'Ass-Midi, la FEGAA-EST VATAN, le BOSAPPAL, l'UGAPLY utilisent des techniques encore rudimentaires de production du maïs. Leur découragement vient du fait de la véritable incertitude du marché. Car si les organisations paysannes pouvaient avoir des clients confirmés, il y aurait une véritable production propre à les faire décoller économiquement et à compenser le manque à gagner que les gros consommateurs connaissent avec les importations de maïs.

L'occasion est donc la bienvenue au cours de cette conférence d'appeler les organismes comme la FAO à regarder avec plus d'attention les organisations paysannes du Cameroun, qui constituent une force de production qui ne cherche qu'à produire, si l'on peut lui garantir des issues d'écoulement et un appui technologique pour les problèmes de transformation et de séchage.

On peut chiffrer la force de travail du mouvement paysan qui se mobilise actuellement.

Zone soudano-sahélienne

Actuellement, il existe des organisations paysannes appuyées par le SAILD dans les régions de Doukoula, Guidiguis et Tchatibali, pour environ 22 000 membres actifs.

Hauts plateaux de l'ouest

Il existe trois organisations paysannes dans les Bamboutos: Madzong Lazizi, Madzong Kwano, UGAPAB. Elles représentent une force de production de 2 000 membres, qui ont l'habitude de la culture du maïs depuis longtemps. En moyenne, un paysan de l'ouest fait 2 à 3 tonnes à l'hectare. Ce maïs constitue une source d'autofinancement pour les populations qui le commercialisent auprès de sociétés de transformation telles que la SPC, et une source d'alimentation car le maïs est un de leurs aliments de base.

Cette activité de production et de commercialisation leur a fait acquérir de nouveaux systèmes de production et de conservation. Il ne leur faut que l'appui des organismes spécialisés (recherche agronomique et technologique) pour pérenniser et développer ces acquis.

Zone forestière

Il existe actuellement une vingtaine d'organisations paysannes pour environ 15 000 membres. Elles sont bloquées par la chute des prix de leurs cultures de rente, qui faisaient hier leur fierté, et n'attendent que des opportunités valables pour s'y lancer entièrement.

Au-delà des essais de «recherche-action» engagés avec les organisations paysannes pour la production de maïs, nous faisons des efforts pour mettre en contact ces organisations paysannes avec des institutions de recherche spécialisées. C'est dans cette optique qu'un programme de décentralisation s'est engagé à l'institut de recherche agronomique avec certaines fédérations de groupements paysans telle la PROGEM (Promotion des groupements économiques de Mengueme) dans le Nyong et So'O.

Un véritable chantier-école pour les paysans

L'activité maïs, entreprise naturellement au sein des organisation paysannes en zone forestière camerounaise, est à la fois une manière pour ces paysans de se jeter à l'eau pour lutter contre la pauvreté, mais constitue aussi un véritable chantier-école pour eux, car la culture intensive du maïs est une activité nouvelle à laquelle beaucoup n'ont d'ailleurs pas cru avant. Les quantités produites laissent entrevoir beaucoup d'espoir; il reste seulement à associer tous les mécanismes d'appui et d'accompagnement du processus. L'ombre du découragement plane cependant sur les organisations paysannes à cause du manque de débouchés sûrs et d'appui techniques.

Quelques provenderies ont fait naître un enthousiasme chez les paysans. Ceux-ci ont commencé à produire, mais voilà que les provenderies n'arrivaient plus à acheter. De grandes unités de commercialisation du maïs continuent à tout acheter aux agroindustries et à l'extérieur du pays, ne cherchant même pas à reconnaître qu'elles auraient tout à gagner à encourager les organisations paysannes (brasseries et Maïscaus). Un partenariat est à envisager.

Les rendements obtenus par les paysans restent très faibles (moins de 3 tonnes à l'hectare). La barrière reste encore évidente entre la recherche et les organisations paysannes, qui seraient des cibles valables grâce aux «chantiers-écoles», cadres de la décentralisation de la recherche agronomique et technologique.

Conclusion

Le maïs constitue aujourd'hui un espoir pour les paysans. En plus de ses vertus alimentaires, car il peut nourrir lêtre humain du nourrisson à l'adulte sous plusieurs formes de préparation, le maïs, par son cycle de production court, permet aux paysans d'avoir accès au marché et de récolter les fruits de leur travail. Mais le maïs peut aussi constituer pour les paysans une source permanente d'amélioration de leur revenu et par conséquent de leur niveau de vie, si et seulement si il peut entrer et avoir une place dans ce cercle vicieux qu'est le marché.

A cet effet, s'il nous était donné de faire des recommandations, elles seraient les suivantes:


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