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Stratégie d'intégration
Une stratégie d'intégration judicieuse des laitages peut être conçue de deux manières. Une première possibilité est d'apporter aux sujets peu ou mal nourris le maximum de lait compatible avec une bonne tolérance clinique (absence de symptôme) et, de surcroît, avec un degré d acceptabilité qui tienne compte des coutumes alimentaires.
Le niveau d'apport souhaité ou conseillé est alors fixé par le maximum de tolérance. Ce premier concept règle certains problèmes des pays producteurs lorsqu'on sait les surplus de produits laitiers accumulés dans certaines régions du monde. Une autre possibilité est de calculer la quantité minimale de produits laitiers qui comble les lacunes en nutriments essentiels de l'alimentation ordinaire. Le second concept risque de mieux s'harmoniser avec les pratiques alimentaires du lieu, qu'il faut avant tout connaître.
La comparaison de la composition du lait avec les besoins en nutriments montre que le lait n'est pas un aliment complet et ne peut être un aliment exclusif. Son intégration n'est harmonieuse qu'en combinaison avec d'autres aliments choisis judicieusement pour établir un équilibre nutritionnel. La manière d'atteindre cet équilibre dépend de deux facteurs: d'une part, des besoins de l'individu (variables en fonction de l'âge) et, d'autre part, des complémentarités alimentaires (changeantes surtout selon les régions).
Perspectives d'une meilleure utilisation selon les régions du monde
Pour aborder le point de la complémentarité des produits laitiers, i 1 convient deconnaître les possibilités alimentaires dans les grandes régions du monde. Dans ce but, la FAO a établi des bilans de disponibilités alimentaires par région que l'on peut comparer aux principaux besoins nutritionnels (figures 24 à 27). Cette comparaison pour l'Amérique du Nord, l'Europe occidentale et orientale, et l'Océanie montre qu'un équilibre nutritif est atteint. Promouvoir la consommation de lait n'a pas d'intérêt dans la mesure où celui-ci est visiblement déjà très utilisé.
L'analyse des données chiffrées se rapportant aux régions d'Afrique, du Proche-Orient, d'Extrême-Orient et d'Amérique latine dévoile que l'apport lacté qui comblerait le déficit en calcium oscille de 250 à 400 ml. Une telle pratique permettrait de rehausser un apport protéique apparemment acceptable, mais essentiellement végétal, donc de fait assez médiocre.
L'introduction d'une certaine quantité de lait améliorerait la couverture des besoins nutritionnels de la manière suivante. Dans les régions du monde où la disponibilité des produits laitiers est particulièrement faible et l'apport protéique animal généralement insuffisant, on observe que la consommation quotidienne d'un tiers de litre de lait de vache ajouté à l'alimentation habituelle apporterait des quantités appréciables de protéines, de calcium, de phosphore et même d'énergie, mais contribuerait pour une quantité négligeable aux besoins en vitamines, en oligo-éléments et en acides gras essentiels.
FIGURE 27 Disponibilités alimentaires et besoins nutritionnels en Amérique latine
Seule dans cette catégorie, la riboflavine fait exception, assurant toujours plus de la moitié des apports souhaitables. Dans une moindre mesure, la présence d'acide folique présente également un intérêt pour les plus jeunes. Il faut enfin signaler l'apport médiocre de fer de cette source animale qu'est le lait.
Dans les mêmes régions, une consommation de 45 à 65 g de fromage à pâte dure (type Hollande) plutôt que de lait permet, pour un apport équivalent de calcium, de mieux fournir la vitamine A, la riboflavine et le zinc. D'une manière plus générale, la consommation d'une quantité ordinaire (80 g/ jour) de fromage à pâte dure (type Hollande) présente un intérêt nutritionnel évident. Outre les caractéristiques nutritives du lait de vache, son dérivé fromager contient en supplément des taux appréciables de zinc et de vitamine A. Ces deux carences (parfois combinées et associées au sein du métabolisme) sont largement répandues dans les pays défavorisés. Il faut noter aussi qu'aucun produit ou dérivé laitier n'apporte en suffisance les acides gras essentiels.
Ce qui précède illustre de quelle manière l'adjonction de lait ou de produits laitiers peut corriger certains déficits en nutriments d'une diète habituelle. Toutefois, tout effort de promotion d'un aliment doit tenir compte de la disponibilité en cet aliment, de celle des autres aliments, des habitudes alimentaires, de l'épidémiologie ainsi que des désordres nutritionnels. Chaque situation est particulière et tout effort de promotion d'un aliment, ici du lait, doit s'ajuster à cette situation en s'appuyant sur les caractéristiques nutritionnelles de cet aliment et donc sur l'intérêt qu'il présente pour améliorer la situation alimentaire considérée.