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Préface

Table des matières - Suivante

ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE

Rome, 1995

Les appellations employées dans cette publication et la présentation des données qui y figurent n'impliquent de la part de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites.

1. Lait 2. Produit laitier 3. Nutrition humaine
1. Titre II. Série

Code FAO: 86 AGRIS: S01

Tous droits réservés. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, mise en mémoire dans un système de recherche documentaire ni transmise sous quelque forme ou par quelque procédé quece soit: électronique, mécanique, par photocopie ou autre, sans autorisation préalable du détenteur des droits d'auteur. Toute demande d'autorisation devra être adressée au Directeur de la Division des publications, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, Viale delle Terme di Caracalla, 00100 Rome, Italie, et comporter des indications précises relatives à l'objet et à l'étendue de la reproduction.

(c) FAO 1995

Dans les trois premières décennies de son existence, la FAO a publié une série d'études sur la nutrition. L'une d'entre elles, parue en 1972, Le lait et les produits laitiers dans la nutrition humaine, s'efforçait de faire le point des connaissances en matière de composition et de valeur nutritive du lait, des procédés technologiques pour conserver le lait dans les différents pays du monde et des mesures à prendre pour assurer un approvisionnement en lait à ceux qui en ont le plus besoin.

Vingt ans après, il a paru nécessaire de procéder à une refonte de cet ouvrage qui tienne compte de l'évolution de la connaissance scientifique et technique et cherche à répondre au mieux aux attentes de notre lectorat potentiel, maintenant mieux formé.

Sans la pratique de l'allaitement (au sein), l'espèce humaine n'aurait pu survivre et ce n'est que très récemment que l'on a assisté à la baisse de cette pratique. Jusqu'au début du XXe siècle, l'enfant a toujours et partout été allaité pendant plusieurs mois. Comme pour toute espèce animale, le lait humain est l'aliment qui assure au mieux le développement du nourrisson et de chacun de ses organes. C'est ainsi par exemple que, par sa composition, il permet la synthèse de molécules qui composent le cerveau humain et assurent la transmission de l'influx nerveux. Les avantages indéniables de l'allaitement sur l'état de nutrition et de santé du nourrisson, tout comme les risques qu'il encourt quand il est nourri au biberon, ont conduit les Nations Unies à encourager la pratique de l'allaitement. Aussi a-t-il été jugé indispensable de commencer la présente publication par un chapitre entièrement nouveau traitant des propriétés physico-chimiques, de la composition et des qualités nutritionnelles du lait de femme.

Depuis 10 000 ans environ, la domestication et l'élevage de l'animal ont permis à l'homme d'accéder à d'autres sources de lait. Le chapitre 2 présente les caractéristiques des laits des espàces domestiques, au premier rang desquelles l'espàce bovine, en prenant le lait de femme comme base de référence. Dans toutes les espèces (humaine et animales), la composition du lait est sujette à variation: les deux premiers chapitres présentent les principales sources de cette variabilité.

Les chapitres 3 à 8 présentent les principes de technologie et les modalités de fabrication des différents types de produits laitiers. Les propriétés nutritionnelles des divers types de produits (y compris des produits laitiers fermentés) y sont analysées ainsi que l'évolution de la consommation de certains d'entre eux.

Le dernier chapitre aborde la place du lait et des produits laitiers dans l'alimentation du sujet en bonne santé ou atteint de diverses pathologies, en particulier de l'enfant mal nourri. En dehors de la période infantile, le lait animal constitue un aliment complémentaire particulièrement indiqué pour redresser ou corriger des déficits latents ou avérés, surtout en situations nutritionnelles critiques.

La FAO tient à remercier vivement les professeurs D. Lemonnier, D. Brasseur et F. Weber, auteurs d'un manuscrit solidement documenté sur les différents laits, leur composition, leur technologie et leur utilisation. La Division des politiques alimentaires et de la nutrition et la Division de la production et de la santé animales dans un effort conjoint ont redimensionné ce manuscrit pour le rendre plus adapté aux besoins et aux attentes du lectorat potentiel.

Cet ouvrage s'adresse plus particulièrement aux cadres des secteurs de l'agriculture et de la santé ayant suivi une formation post-secondaire de trois ou quatre ans. Cela correspond en général au niveau de formation initiale des vulgarisateurs agricoles, des spécialistes de l'économie familiale, des infirmier(e)s, des assistantes sociales, des techniciens en nutrition et en technologie alimentaire. La lecture de cet ouvrage peut également s'avérer intéressante pour un public de cadres supérieurs en agronomie ou en médecine souhaitant s'ouvrir à des domaines qui ne sont pas du ressort de leurs spécialités.

John Lupien
Directeur
Division de l'alimentation et de la nutrition


Chapitre 1 Le lait de femme

Introduction

L'allaitement maternel a constitué depuis toujours le mode alimentaire naturel et, jusqu'à récemment, quasi exclusif des nouveau-nés et nourrissons. Avec le XXe siècle, l'alimentation artificielle, basée essentiellement mais non exclusivement sur l'emploi du lait de vache, a pris un réel essor dans les pays industrialisés où ce changement de comportement a répondu à un besoin social (Vis et Hennart, 1978).

Ce bouleversement n'a été possible que grâce à des procédés technologiques nouveaux, assurant mieux l'hygiène et la conservation des laits. En préconisant un usage autre que celui prévu par la nature, les biologistes et médecins ont découvert bien involontairement les avantages et les inconvénients des divers laits animaux en nutrition infantile. Il y a déjà un siècle, Bunge (1898) avait montré qu'il existe une relation entre le temps de doublement du poids de naissance et les teneurs lactées en protéines et en minéraux des mammifères qu'il avait étudiés (tableau 1).

Les conséquences néfastes sur bien des points de l'alimentation artificielle des nourrissons ont suscité un regain d'intérêt pour l'allaitement maternel et stimulé les recherches sur les propriétés spécifiques des laits animaux. Si les ditfférences entre les laits de diverses espèces ne s'expliquent pas toutes, elles trouvent, au sein de chacune d'elles, des compensations qui les annulent ou les atténuent, ainsi que le montre le cas du fer; peu abondant dans tous les laits. L'enfant nouveau-né vit sur ses réserves hépatiques alors que le porcelet absorbe quasiment dès sa naissance le ferqu'il trouve en fouillant le sol. Ainsi, soit le lait est adapté aux besoins et à la croissance du petit, soit les comportements alimentaires innés ou les réserves propres pallient les carences nutritives du lait.

TABLEAU 1

Composition du lait de divers mammifères et vitesse de croissance de la progéniture

Espéces Nombre de jours pour doubler le poids de naissance

Teneur du lait (g/litre)

Lipides Protéines Lactose Cendres
Femme 180 38 9 70 2
Jument 60 19 25 62 5
Vache 47 37 34 48 7
Renne 30 169 115 28  
Chèvre 19 45 29 41 8
Brebis 1 0 74 55 48 10

Source: Bunge, 1898

Une réflexion analogue peut être faite sur les facteurs immunitaires des laits. La teneur en immunoglobulines du colostrum et du lait de transition varie fortement selon les espèces. Il en va de même pour leur absorption intestinale chez le nouveau-né. Ces facteurs de protection immunitaire contribuent à assurer le développement et l'intégrité de la muqueuse intestinale et donc son pouvoir d'assimilation. Un lait privé de ses facteurs immunitaires ne permet sans doute plus aux capacités digestives de s'exprimer pleinement et n'est plus, au plan nutritif, le même lait.

Le lait représente l'aliment idéal pour le jeune de l'espèce, mais pour un temps limité et dans certaines conditions seulement d'état des réserves initiales, de comportement, de milieu de vie. Son intérêt nutritif se restreint encore s'il est destiné aux membres d'une autre espèce. C'est sur ces lacunes que doit porter l'attention en nutrition humaine, non pas pour déprécier les autres laits, mais pour les utiliser avec discernement. On peut utiliser un lait animal complémenté ou en complément et, de ce fait, il demeure dans bien des sociétés humaines une base nutritionnelle irremplaçable.

Importance nutritionnelle

En nutrition infantile, la composition du lait maternel est une sorte d'étalonor. Tout composé qui s'y trouve possède à priori une utilité nutritionnelle ou immunitaire. Quand, dans le jeune âge, le lait de femme vient à manquer, le substitut proposé devrait ressembler au lait humain plus en ce qui concerne ses fonctions biologiques qu'en ce qui concerne sa composition chimique. Aucun lait animal ne possède naturellement ses qualités, ce qui est logique s'ils sont eux aussi profilés pour répondre au mieux aux besoins de chaque espèce. C'est donc la composition du lait de femme qu'il importe de bien connaître en nutrition infantile.

Ces données permettent d'établir la quantité des divers éléments nutritifs qui favorisent une croissance harmonieuse. Par comparaison, il est possible d'en déduire la valeur d'un lait animal en nutrition humaine. Cette confrontation reste très théorique (des moyennes sont comparées entre elles) et est, de plus, entachée d'erreurs, car le taux d'un nutriment dans le lait ne présume pas de sa biodisponibilité: certains minéraux sont plus ou moins fortement liés à des protéines porteuses, certains acides aminés ou gras sont piégés dans des substances complexes (protéines, triglycérides).

Ces comparaisons permettent surtout de suspecter des insuffisances dans les laits animaux (acides gras essentiels, vitamines oligo-éléments), et des apports toxiques sont également à craindre lorsque les teneurs s'avèrent franchement excédentaires (azote, calcium et phosphore) pour l'être humain.

Non seulement le lait maternel imprime les caractéristiques de croissance et de développement (que certains jugent idéales), mais encore sa composition subit des variations qui semblent également répondre aux besoins changeants du petit. Cette dynamique existe dans toutes les espèces, mais est spécifique de chaque espèce.

Le nutritionniste s'intéresse moins aux concentrations lactées qu'aux besoins infantiles réels. C'est en termes d'apports journaliers, donc en calculant d'après le débit lacté de 24 heures (variant chez la femme souvent de 600 à 850 ml/jour), que les valeurs des besoins quotidiens sont établies pour les premiers mois. Lorsque l'allaitement n'est plus exclusif, de telles déductions ne sont plus possibles. Il en va de même en situation de malnutrition maternelle sévère (débit lacté parfois inférieur à 300 ml/jour) (OMS, 1987).

Composition

Caractéristiques physico-chimiques

Le lait humain contient environ 87 pourcent d'eau et son osmolarité, voisine de 290 mOsm/litre, est proche de celle du plasma (de 250 à 290 mOsm/litre). La densité spécifique du lait maternel varie de 1,026 à 1,037 et le poids des matières sèches varie de 100 à 175 g/litre (tableau 2). Plus de la moitié de cette masse est constituée de lactose (de 70 à 80 g/litre), un quart environ de lipides (de 35 à 40 g/litre) et une part bien moindre de protéines ( 1 O g/litre environ) et de minéraux (2 g/litre).

Les protéines sont présentes dans le lait en suspension colloïdale (micelles) et c'est leur dispersion avec les sels de calcium qui donne cette opacité caractéristique dite «laiteuse». Les glucides (le lactose) s'y trouvent en solution vraie alors que les lipides s'y trouvent sous forme de globules gras répartis (ou émulsionnés) dans la phase aqueuse. La dimension des globules gras varie de 1 à 3 micron(s) dans le colostrum et le lait de transition pour augmenter quelque peu (de 3 à 6 microns) dans le lait mature, ce qui n'est pas sans rapport avec sa digestibilité.

L'essentiel (80 pour cent) des structures membranaires présentes dans le lait humain compose la paroi des globules gras, une faible proportion (20 pour cent) se retrouve dans la phase solide du lactosérum et une infime quantité se trouve dans les cellules somatiques (Iymphocytes, macrophages).

Lors de la formation des gouttelettes lipidiques dans les cellules de la glande mammaire, une membrane (dérivée de l'appareil de Golgi) vient entourer le futur globule gras. Ces parois sont faites de (glyco-) protéines, de phospholipides, de triglycérides, de cholestérol et d'enzymes. Elles jouent un rôle d'émuisifiant et empêchent la lipolyse spontanée et l'oxydation trop facile des graisses du laits ce qui lui évite de rancir et lui conserve un goût agréable.

La réalisation de l'émulsion permet la dispersion des lipides au sein de la phase aqueuse; la conservation au froid «casse» l'émuision et sépare les deux phases. Une coalescence des globules gras survient aussi après l'addition intempestive ou exagérée d'acides gras à chaîne moyenne, d'huiles végétales, d'amidons ou d'autres produits d'enrichissement. Les parois du globule gras sont déstabilisées sous l'action détergente des sels biliaires, ce qui permet aux lipases (linguales, pancréatiques et celles du lait) d'hydrolyses les triglycérides.

L'existence même des globules gras revêt une importance nutritionnelle fondamentale, qui va au-delà du simple transport ou de la digestion des lipides. Ces globules représentent l'apport principal d'énergie et d'acides gras essentiels. Ils contribuent aussi à 1 'apport de vitamines liposolubles, de (glyco)protéines. phospholipides et de cholestérol. Le cholestérol du lait est incorporé chez le nourrisson dans les tissus de l'organisme en croissance (cerveau notamment). Les glycoprotéines sont à l'abri de l'hydrolyse digestive et certaines hormones (ACTH, TSH) traversent intactes la paroi intestinale pour entrer dans la circulation. Les parois membranaires contiennent également des sphingomyélines, de la phosphatidyl-choline et des gangliosides qui entrent dans la composition des tissus nerveux.

Valeur énergétique

La teneur énergétique moyenne du lait mesurée en kilocalories est proche de 690/litre, mais les valeurs individuelles varient considérablement (tableau 12).

Protéines et substances azotées

Azote total. L'azote total du lait maternel (l'équivalent des «matières azotées» en terminologie industrielle) est un paramètre chiffré peu usité en pratique médicale. On préfère lui substituer, en le subdivisant, l'azote en protéines (en g/litre) et l'azote non protéique (dénommé d'après les initiales anglo-saxonnes NPN: non protein nitrogen) et rapporté en g/litre ou en g d'azote/litre (g N/litre). Dans le lait maternel, les protéines et l'azote non protéique représentent respectivement environ 75 et 25 pour cent de la composante azotée totale.

TABLEAU 2 Caractéristiques physico-chimiques du lait humain

Constantes Moyennes

Valeurs extrêmes

Energie (kcal/litre) 690 446 1 192
(MJ/litre) 3 127 1 876-4 989
Densité spécifique 1,031 1,026 1,037
pH à 20°C 7,01 6,40- 7,60
Matières sèches (g/litre) 1 29 1 00 - 1 75
Cendres totales (g/litre) 2,02 1,60 2,66
Point de congélation (°C) -0.530 -0.519 -0.550
Indice de rétraction (nD20)   1,347 1,348
Osmolarité (basée sur point de congélation) (mOsm/kg) 293 290-296
Viscosité à 25°C (centipoises)   1,628 1,693
Tension superficielle à 25°C (dynes/cm) 49 48 - 50
Indice de réfraction des graisses (nD40)   1,457 1,458
Point de fusion des graisses (°C) 32  
Diamétre moyen des micelles de caséine (nm) 42 40-45

Source: Lentner, 1981

Protéines. Le taux des protéines totales du lait maternel (tableau 3) est compris entre 12 et 13 g/litre quand il est évalué par la méthode classique de Kjeldabl et entre 8,5 et 9,0 g/litre avec la méthode de l'analyse des acides aminés totaux. Ce taux est proche de 9,6 g/litre quand la méthode de l'azote non dialysable est utilisée.

Ces protéines constituent un ensemble partagé en deux grandes fractions d'après leur précipitation en milieu acide à pH 4,6. La fraction des caséines coagule dans ces conditions tandis que les autres protéines restent solubles (protéines sériques ou protéines du lactosérum). Ces dernières représentent les deux tiers environ des protéines totales du lait humain. Ce partage permet de définir un quotient formé par le rapport entre protéines solubles et caséines. Il est voisin de 65:35, voire 70:30 et même, pour quelques auteurs, de 80:20. Certaines protéines sériques (immunoglobulines) ne relevant pas de l'apport nutritif, le rapport pourrait être en termes nutritionnels fixé à 40:60, les caséines étant presque totalement assimilables.

TABLEAU 3 Composition protéique du lait humain (g/litre)

Protéines Moyennes

Valeurs extrêmes

Protéines totales 10,60 7,30-20,00
Caséines 3,70 1,40-6,80
Protéines solubles: 6,90 4,00-10,00
a-lactalbumine 3,60 1,40-6,00
Lactoferrine 1,50 1.00 3 20
Lysozyme 0,1 2 0, 04 - 0.21
Albumine sérique 0,50 0,20-0,97
IgA sécrétoires 1,00 0,60- 1,60
IgG 0,01 -
IgM 0,01 -
IgD _ _

Caséines. Celles-ci sont des glycoprotéines phosphorylées séparées à l'électrophorèse et identifiées d'après leur pouvoir de migration en caséine alpha, bêta, lambda et kappa. Les caséines se constituent en micelles, ce qui les rend plus accessibles à la digestion carboxypeptidasique dans l'intestin.

Protéines solubles. Le lait écrémé débarrassé de la caséine n'est plus qu'un lactosérum qui contient encore les protéines solubles, importantes pour leurs rôles nutritionnel et immunitaire, le lactose et une partie des minéraux.

Cinq constituants majeurs sont identifiés parmi les protéines solubles du lait maternel (tableau 3). L'a-lactalbumine en représente la plus grande quantité et existe dans tous les laits qui contiennent du lactose, étant le coenzyme de la synthétase qui catalyse la formation du lactose dans la glande mammaire.

La lactoferrine (une glycoprotéine) représente un sixième environ des protéines du lactosérum. Elle peut fixer deux atomes de Fe3+ et n'est saturée qu'entre 2 et 4 pour cent (Spik et al., 1982). Elle joue probablement un rôle primordial dans l'absorption intestinale du fer chez le nourrisson. Comme cette protéine n'est pas complètement dégradée au cours de la digestion et garde donc la capacité de fixer réversiblementle fer dans l'intestin, les bactéries ferdépendantes du tube digestif sont privées d'un nutriment essentiel à leur croissance. La lactoterrine possède ainsi un pouvoir bactériostatique puissant.

Le Iysozyme (ou muramiduse) est une enzyme hydrolysant des liaisons glycosidiques particulières, qui interviennent notamment dans la configuration des parois bactériennes (Reiter, 1984). Le lait humain possède, grâce au Iysozyme, un effet bactériolytique puissant de l'ordre de 100 à 10 000 fois plus élevé que chez nombre de mammifères.

Les quantités de lactoferrine (figure 1 ) et de Iysozyme du colostrum sont élevées et diminuent au cours de la lactation. Les taux de lactoferrine diminuent moins vite que ceux des immunoglobulines. Les deux glycoprotéines échappent à la digestion gastrique et pancréatique et se retrouvent en grande partie dans les selles. Toutefois, selon certains auteurs, près d'un quart de ces protéines peut néanmoins être nutritionnellement utilisé (Nichols et a/. 1987) ce qui dans l'absolu représente des quantités appréciables.

L'albumine sérique (sanguine) est aussi présente dans le lait à des taux intermédiaires entre la lactoferrine et le Iysozyme.

Il existe quatre types d'immunoglobulines dans le lait (IgA, IgG, IgM et IgD). La principale d'entre elles (IgA) existe sous forme d'anticorps sécrétoire. Leurs taux diminuent en cours d'allaitement, mais restent substantiels. Les anticorps sont dirigés contre un ensemble de bactéries digestives (comme Escherichia coli Salmonella et Shigella) ou respiratoires (comme Haemaphilus influenzae et Klebesiella pneumoniae) de virus (cytomégalovirus, poliovirus, RSV, rotavirus, etc.), et même de parasites (comme Giardia lamblia et Entamoeba histolyca) (Hanson, 1988).

Enfin, le lait de femme ne contient pas de ß-lactoglobuline, constituant important du lait de vache.

FIGURE 1 Evolution des taux de diverses protéines du lait de femme au cours de la lactation

Azote non protéique. Le lait contient de la créatinine et de la créatine, des nucléotides, des acides nucléiques et des polyamines dont les rôles sont mal connus (tableau 4).

Les acides aminés libres du lait maternel ne représentent que 8 à 20 pour cent de l'azote non protéique et dépendent de la nature de l'alimentation maternelle. Leur rôle est peu connu, mais on attribue à la glutamine (l'acide aminé libre le plus abondant) un rôle trophique sur l'intestin.

TABLEAU 4 Substances azotées non protéiques du lait humain (mg/litre)

Substances azotées Moyennes Valeurs extrêmes
Urée 530 350-810
Créatinine 20 1 2 - 1 00
Acide urique 9  
Ammoniac 4  
Acides aminés libres 200 65 -300
Taurine 48 12 - 100
Carnitine 60 28 - 80
Choline 9 -
Divers:
N -acétyil glucosamine 1 50 -
N-acétyl neuraminique 150 80 -800
Oligo-peptides - 1 7 - 60
Nucléotides 3 -
Polyamines 0 2 -
TOTAL 850 440 -1 000

La taurine, une amine soufrée, intervient dans la conjugaison des acides biliaires et joue un rôle fonctionnel au sein des photorécepteurs rétiniens (Wright et Gaull, 1988).

La carnitine (dipeptide: méthionine et Iysine) est présente dans le lait à des taux variables (de 35 à 90 micromol/litre) et cette teneur diminue avec le temps. Elle contribue au transport des acides gras à l'intérieur de la mitochondrie où s'effectue leur oxydation.

Enzymes impliquées dans la digestion protéique. Le lait humain contient des protéases à activité trypsinique, mais elles semblent peu actives ou naturellement inhibées (notamment par les IgA). Il existe également des antiprotéases (a- l -antitrypsine et a- 1 -antichymotrypsine) dont le rôle reste hypothétique (effet antiallergique ou antibactérien).

Importance nutritionnelle des protéines. A un stade de la vie où la croissance extra-utérine prend le relais de la croissance intra-utérine, l'apport acides aminés est fondamental. Les carences quantitatives (malnutrition où la composante protéique domine) marquent leurs effets irréversibles surtout sur le système nerveux: le développement du cerveau est entravé et les capacités intellectuelles peuvent être atteintes.

Des carences plus qualitatives sont illustrées par certaines maladies congénitales du métabolisme des acides aminés ou par les régimes d'exclusion trop sévères en vue de traiter celles-ci (rôle essentiel et négligé de la tyrosine lors des premiers traitements diététiques de la phénylcétonurie, par exemple) (voir chapitre 9). Ici encore, les répercussions les plus marquées et les plus définitives portent sur le système nerveux.

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